A Quiet Place (2018)

Réalisé par : John Krasinski
Ecrit par : John Krasinski, Scott Beck et Bryan Woods
Avec : John Krasinski, Emily Blunt, Millicent Simmonds

John Krasinski, tu joues avec mes nerfs ! Lorsque j’ai entendu parler de A Quiet Place (Sans un bruit, en VF) il y a quelques mois, mes impressions étaient mitigées. J’étais bien sûr excitée à la perspective de découvrir un potentiel petit bijou, de par son concept sobre des plus alléchants (une famille se protège de créatures féroces, attirées par le bruit, qui rôdent dans les environs) ; mais j’étais plus sceptique quant au fait de pouvoir vraiment apprécier ce film dans de bonnes conditions. En effet, je pense ne rien vous apprendre en disant qu’il est de plus en plus difficile, de nos jours, d’avoir affaire à une salle de cinéma silencieuse et des spectateurs respectueux. Et pouvoir apprécier un film majoritairement silencieux s’apparente alors à une mission-suicide. C’est donc avec cette ambivalence que je me suis rendue au cinéma, m’attendant à en ressortir frustrée par des spectateurs dénués de tout savoir-vivre qui m’auraient gâché mon visionnage. Et, même si ça a en partie été le cas, l’intensité de l’expérience que j’ai vécue l’emporte largement sur les désagréments subis.

Le synopsis du film est des plus simples : une famille vit recluse dans une maison à la campagne, entourée de créatures sanguinaires attirées par le moindre bruit. La petite famille n’a d’autre choix que d’être parfaitement silencieuse si elle veut rester en vie…

Le film étant en grande partie muet, chaque bruit étant étouffé par les protagonistes pour ne pas alerter les créatures, TOUS les sons deviennent assourdissants, à l’écran comme dans la salle, d’ailleurs (maudits sachets de bonbons). De fait, le moindre bruit fort occasionné par les personnages est ressenti au centuple par le spectateur. C’est une très bonne chose, car les bruits étant synonymes de mort pour les personnages, il est primordial que le spectateur en mesure également toute l’ampleur.

Taisez-vous ! Le film commence.

En ce qui me concerne, je dirais que le film a deux atouts majeurs, qui lui ont permis de remporter mon adhésion.

Le premier atout du film est ses scènes d’horreur, parfaitement maîtrisées. John Krasinski, pourtant débutant dans le domaine, réussit là un coup de maître. Elles sont phénoménales ! La tension est à son comble. La scène de l’accouchement est à elle seule une véritable prouesse. J’en aurais bien pleuré tant j’étais nerveuse et crispée tout du long. Ces scènes de suspense alternent avec des scènes plus brutales, qui laissent le spectateur bouche bée, à l’image de la première scène d’attaque, qui m’a laissée sous le choc durant plusieurs secondes.

Le second atout est de taille lui aussi : Emily Blunt. C‘est une actrice que j’ai toujours appréciée, mais elle ne m’avait jamais autant subjuguée que dans A Quiet Place. Je ne pouvais pas détourner mon regard d’elle tant elle était sublime dans chaque plan. Elle est magnifiquement filmée par son mari à la ville comme à l’écran, Krasinski lui-même, que ce soit au naturel, lorsqu’elle passe du temps avec ses enfants, ou dans des situations extrêmement difficiles (ce qui arrive souvent ; il ne la ménage pas, John, c’est le moins que l’on puisse dire). Sa prestation, tout en souffrance et angoisse contenues, est tout bonnement époustouflante. Krasinski, quant à lui, est également très convaincant en papa prêt à tout pour le bien-être de sa famille. Je dirais même que c’est un acteur qui se bonifie avec le temps.

Emily Blunt qui souffre pour le film de son mari

Le tout est très bien filmé, avec des plans de toute beauté. Le film est vraiment beau, esthétiquement parlant, sans jamais en faire trop. Dès la première scène, par exemple, on a droit à une vue magnifique montrant la famille marchant doucement, en file indienne, le long d’une ligne blanche dessinée sur sol. Chaque plan semble nécessaire au film, et on ressent une extrême sincérité dans le travail de Krasinski, et pas simplement une volonté de « faire joli », comme c’est trop souvent le cas

chez certains réalisateurs. Par ailleurs, tout le film baigne dans une atmosphère particulière, à la fois chaleureuse, de par ses couleurs, et inquiétante, de par les menaces environnantes que l’on devine à l’extérieur.

En ce qui concerne ces menaces (les fameuses créatures), on ne sait quasiment rien à leur sujet, que ce soit leurs origines (extraterrestres ?) ou même leur but, et c’est très bien comme ça. Une tentative de surexplication aurait gâché l’aura de mystère planant autour du film.

Une première scène terrifiante

Malgré toutes ces qualités, je ne peux toutefois nier que le film souffre de quelques imperfections.

Tout d’abord, quelques incohérences sont à déplorer dans le scénario lui-même. Par exemple : la mère de famille n’aurait-elle vraiment pas pu éviter de tomber enceinte ? Je sais que des grossesses accidentelles peuvent arriver, mais il me semble que dans ces conditions extrêmes, on prend les mesures nécessaires pour l’éviter, quelles qu’elles soient… Ou cette méga fuite d’eau, personne n’aurait pu l’entendre ou la voir avant que la pièce ne soit à moitié immergée ? Ou encore cette simple porte métallique, comment fait-elle pour résister à l’assaut de la créature, qui parvient pourtant à percer la paroi d’un silo à grains quelques secondes plus tard ?

A ces incohérences s’ajoutent des dialogues vraiment bateaux, gnangnans et clichés à souhait, que ce soit entre le mari et sa femme, ou entre le père et ses enfants. Le silence se suffirait à lui-même, inutile d’en rajouter une couche avec des conversations vues et revues cent fois qui ne font qu’alourdir le propos. De ce point de vue-là, c’est très décevant.

Un autre bémol concerne la musique. Celle-ci est omniprésente, très lourde (je la qualifierais même de larmoyante par moments), et je m’interroge sur sa nécessité. A la place de Krasinski, j’aurais peut-être tenté d’aller au bout de mon concept et d’enlever toute cette musique redondante avec ce qui se passe à l’écran, et ce afin de conserver au maximum le caractère dépouillé et minimaliste du film.

Dans un autre ordre d’idée, j’ai eu beaucoup de difficulté à supporter le personnage de la jeune ado malentendante (interprété par Millicent Simmonds, aperçue dans le catastrophique Wonderstruck), que j’ai trouvé tout bonnement insupportable. Ses actes et ses réflexions sont tout plus débiles les uns que les autres, et je me suis surprise plusieurs fois à souhaiter qu’elle y passe.

Quant à la résolution finale, elle est un peu décevante à mes yeux. Je trouve qu’un tel film méritait mieux que l’explication pseudo-scientifique à laquelle on a droit.

Même si les défauts que j’ai cités plus haut peuvent sembler handicapants pour le film, il n’en est rien ! Aussi étrange que cela puisse paraître, les grandes qualités du film suffisent à nous faire oublier ses points faibles. Grâce aux scènes de tension, notamment (qui sont magistrales, je le répète), on pardonne facilement au film tous ces défauts, qui passent au second plan.

En résumé, je dirais donc : vive John Krasinski ! Il s’agit vraiment d’un cinéaste à encourager tant il a un bel avenir devant lui. Courez voir le film, et n’hésitez pas à faire autant de bruit que possible pour le faire connaître auprès de votre entourage. Parce qu’on en veut davantage, des films comme ça !

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