The Shape of Water (2017)

Réalisé par : Guillermo Del Toro

Ecrit par : Guillermo Del Toro, Vanessa Taylor

Avec : Sally Hawkins, Michael Shannon, Doug Jones, Octavia Spencer, Richard Jenkins

Guillermo Del Toro a toujours eu une grande notoriété dans le monde cinématographique. Malheureusement, la majorité de ses films après Mimic (1997)  ont peu d’effet sur moi. Mis à part peut-être Pan’s Labyrinth (2006), j’ai toujours trouvé que ses scénarios étaient trop enfantins et simplistes pour le style d’histoire qu’il veut porter à l’écran. Ce n’est pas que je les trouve nécessairement mauvais, mais ils ne me touchent tout simplement pas. Puis, il y a quelques années est arrivé Crimson Peak (2015) qui a été un renouveau pour le réalisateur. Alors qu’il avait essuyé des échecs avec de nombreux projets qui n’avaient jamais vu le jour sous sa main comme la trilogie The Hobbit ou son ambitieuse adaptation d’un livre de H.P. Lovecraft, At the Mountains of Madness, Del Toro revenait à un style plus personnel, plus viscéral et extrêmement léché visuellement. Cela m’avait beaucoup plu et c’est avec grand plaisir que le cinéaste remet ça avec son plus beau film : The Shape of Water.

Elisa Esposito (Sally Hawkins) est une femme de ménage sourde travaillant dans une base secrète américaine en pleine Guerre Froide. Sa vie est monotone, mais elle semble s’y plaire. Tout sera chamboulé par l’arrivée d’une créature marine (Doug Jones), capturée par le gouvernement et enfermée dans le bâtiment. Alors qu’elle commence à s’enticher du monstre, partageant régulièrement son repas avec lui lorsqu’elle doit faire le ménage dans la pièce, elle apprend que son nouvel ami sera prochainement disséqué. A l’aide de son voisin (le génial Richard Jenkins), elle fera tout ce qui est en son pouvoir pour le libérer.

The Shape of Water est comme si Del Toro avait vu les films de Jean-Pierre Jeunet (Delicatessen, Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain) et s’était dit : « Je veux faire un film comme ça ». Il a donc pris ce style et ne s’est pas contenté de le recopier, mais il se l’est approprié et l’a modelé à son image. On a donc des plans à la Jeunet, des décors et costumes qui font très européens, de l’accordéon à chaque scène, mais il n’y a aucun doute, c’est bien un film de Del Toro. Partout où l’on regarde, on remarque bien sa patte.

En effet, Del Toro réussit, dès la première scène, à imposer son style, et le résultat est hallucinant. Les plans sont tout simplement magnifiques, en particulier ceux que l’on voit sous l’eau. Ils sont peu nombreux, mais ils sont parfaitement maîtrisés. Le directeur photo utilise à merveille l’éclairage pour mettre en valeur les couleurs dans un milieu inondé. Il y a quelque chose de poétique dans le fait de voir le personnage principal flotter avec la créature dans ses bras. Habituellement, lorsque les personnages sont complètement immergés, l’eau est utilisée afin de créer une atmosphère étouffante et claustrophobe. Ici, c’est tout à fait le contraire. On se sent apaisé et à l’aise, comme si c’était l’état normal des choses.

Del Toro réussit à jongler avec brio entre les différentes émotions que le spectateur est censé ressentir. Tantôt, on sera anxieux face au plan qu’élabore Elisa pour libérer son nouvel ami. Tantôt, on sera touché par l’histoire d’amour qu’ils vivent. Le réalisateur réussit à voyager aisément sur notre échelle émotionnelle, passant d’un extrême à l’autre d’une manière extraordinairement fluide.

Par ailleurs, le film aurait facilement pu paraître absurde, notamment à cause de la relation amoureuse entre les deux protagonistes. Mais celle-ci reste crédible.  Un peu à l’image de la relation qu’ont Ann Darrow et King Kong dans la version de Peter Jackson, on croit à la véracité de leur union.  Del Toro et Vanessa Taylor prennent leur temps pour développer celle-ci. Ce n’est pas un coup de foudre, c’est une histoire qui progresse lentement pour mener à une relation passionnelle.

Dans un autre ordre d’idées, les personnages sont intelligemment développés. Que ça soit les protagonistes ou antagonistes, ils ont chacun plusieurs scènes qui nous permettent de bien les appréhender. Ils ont chacun leurs objectifs, leurs motivations, leur personnalité. Certains d’entre eux semblent clichés au départ, mais, au fur et à mesure que le film progresse, une profondeur se crée pour chacun d’eux.

Ceci dit, ce qui rend les personnages si convaincants n’est pas uniquement le scénario, mais surtout le travail exceptionnel des acteurs. Ils sont tous au maximum de leur forme. Sally Hawkins et Doug Jones sont touchants en tant que protagonistes principaux. Octavia Spencer et Richard Jenkins sont fantastiquement attachants alors qu’ils incarnent les amis d’Elisa, lui donnant toute l’aide nécessaire pour qu’elle parvienne à son but. Et que dire de Michael Shannon, en antagoniste narcissique, qui est, comme d’habitude, sensationnel. Son personnage est une ordure détestable et le spectateur le méprisera sans doute dès qu’il le verra à l’écran.

C’est donc avec succès que Del Toro a réussi à mettre en scène son meilleur film jusqu’à présent, un conte qui rappelle Pan’s Labyrinth, mais beaucoup plus accessible et plus abouti visuellement. The Shape of Water raconte une histoire captivante qui ne laissera personne indifférent.

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